LE REBUS A BON DOS - Ch 2 -
Le voyage.
J'ai eu le temps de prendre le dossier que le chef avait reçu. Il était
arrivé un peu plus tard sur un système dont nos expert nous assurent
qu'il est codé tellement serré que eux mêmes parfois ne s'y retrouvent
pas. Dans ce dossier, sans rire, il est fait mention d'un rébus. Un
rébus qui permettrait d'identifier une personne, il y est également
fait mention de tatouages dont l'origine remonte au XIII° siècle. Et
enfin d'une expertise qui démontrerait que le tatouage est superposé
sur un autre. Le plus vieux tatouage serait en vieille langue arabe.
Par contre ce qui n'est pas précisé c'est pourquoi c'est une affaire
criminelle, à part les initiales officielles du dossier. Il doit y
avoir quelque chose de plus dans cette histoire. En ce qui concerne mes
relations sur place, M. Guillaudeau précise que c'est lui qui viendra
me chercher à l'éaroport de Narita. Le vol qu'il m'a réservé est parti
cet après midi d'un dimanche gris, pour s'élever au dessus des Alpes,
qui sont, elles, blanches et ensoleillées sur un ciel si bleu que je
sauterai dedans. Sans lyrisme, le même chargé de mission auprès des
forces de sécurité japonaises de l'intérieur, c'est le nom officiel
pour flics, m'informe que l'aéroport est situé à deux heures de Tokyo
en voiture. Par commodité il prendra avec moi un train express. Je
passerai à l'immigration comme tout un chacun et aucun passe droit ne
m'est accordé. Je suis invité, c'est tout. Air France, que les pilotes
de SWISSAIR ont appelé autrefois « Air Chance » : "parce que une fois tu
arrives, une fois tu arrives pas". Essayez de le dire avec l'accent du
Valais. Cette aimable compagnie m'a installé à l'étage de la classe
affaire sur un Boeing 747 qui n'est plus tout jeune : la porte des
toilettes ferme mal et l'hôtesse m'en a voulu quand elle m'a suprise en
slip et que je ne lui ai pas souris sur le coup. Il doit y avoir de
nouvelles règles sur les relations équipage et clients dans les avions
français maintenant. Dans mon souvenir que ce soit avec Dutronc ou avec
Belmondo, il se passe toujours quelque chose avec une hôtesse. Peut
être est ce uniquement au retour ? Je me réveille dans une clarté de
soleil que je ne connais pas. Il se lève. Et comme un fait exprès ses
rayons s'étirent au dessus d'un ciel blanc. A s'y méprendre c'est le
drapeau du Japon. La voix de l'hôtesse nous informe que nous amorçons
notre descente sur Tokyo Narita. L'écran montre le paysage en dessous.
Ce sont des maisons en bois noir fumé au milieu de ce qui sont peut être
des rizières. Il y a un ruban gris-bleu fourni en voitures et camions
de tous genres. C'est maintenant l'annonce en japonais. A mon avis à
cette heure-ci de la journée plutôt que « Ho haio..; » et le reste, il
vaut mieux utiliser « Kon bawa » ou peut être même « Konichiwa ». Bon
je demanderai en arrivant. Leur aéroport est entouré de petites tours
du Moyen Age avec des banderoles qui accusent la Municipalité de ne pas
respecter ses engagements pour son extension. C'est rassurant, je suis
dans un pays civilisé. Il suffit de se plaindre pour que des visiteurs
se rendent compte que le pays vit en démocratie. Je suis dans la file
interminable de ceux qui doivent présenter leur passeport. Il y au
moins quatre ou cinq avions qui viennent d'arriver et comme nous sommes
surtout des étrangers, nous nous suivons à la queue leu leu notre
passeport à la main et trainant nos sacs. C'est silencieux. Les préposés
âgés qui orientent ceux qui débouchent sur les comptoirs, rappellent à
l'ordre les étrangers barbares qui n'ont pas compris que c'est le
désordre qu'ils s'orientent tout seuls. L'officier de l'immigration me
salue en français. Elle fronce les sourcils qu'elle a remarquablement
fin, en lisant que je suis flic à Europol. Ca doit correspondre à
quelque chose qu'elle a appris et dont elle ne souvient plus.
- Etes vous
ici en congés, Monsieur Het Uoual
- Aïte Ou alih, mademoiselle.
Je lui
répère deux fois. Elle me sourit un peu.
- Monsieur Aïteu Oualiheu, êtes
vous ici en vacances ?
M. Guillaudeau n'avait pas d'instructions
précises à me laisser sur ce que je devais dire.
- Oui, mademoiselle
l'officier, je viens participer à un concours de mots fléchés en
japonais.
Elle ouvre de grands yeux, secoue la tête.
- Vous ne devez
pas vous moquer d'un officier de l'immigration, le savez vous ?
Je
lui réponds en japonais et je m'excuse en lui redisant que j'ai été
invité pour un concours de rébus. Je ne connais pas le mot en japonais,
par contre je
connais celui de mots fléchés, c'est pour ça que j'ai pris celui là.
Elle tamponne mon passeport, y accroche le reçu
qui donne la date prévue de mon départ et toujours secouant la tête
fait signe au suivant d'approcher.